mardi 10 novembre 2015

Besoin d'efficacité, attention!

C'est souvent à l'occasion de séances plus difficiles que l'on apprend le plus. On se rappelle que rien est acquis, qu'il faut toujours se remettre en question, qu'on est en terrain humain et donc d'imprévisibilité, qu'il faut se méfier de la recherche d'une certaine "efficacité".


Evaluer une séance est difficile, certains tableaux peuvent nous y aider. Mais ce qui est le plus dur à accepter est une séance où il ne semble pas se passer grand chose et donc un peu déstabilisante pour le musicothérapeute car nous sommes humains nous aussi, et avons ce besoin d'efficacité visible pour nous sentir "rentables, efficaces, à la hauteur" à nos propres yeux mais aussi aux yeux de ceux pour qui nous travaillons.


Certains ateliers musiques sont pleins de joie, d'impros, de vie, d'échanges, d'autres sont plus silencieux, parfois englués dans une sorte d'apathie difficile à lever, parfois remplis de "silences", de "non" réactions visibles, parfois encore de réactions qui semblent négatives. Il ne faut pas oublier qu'une réaction de refus, permet aussi à la personne de communiquer, de s'affirmer, c'est une réaction plus difficile à recevoir mais peut-être que cette personne en déchargeant cette tension aura répondu à un besoin de s'exprimer. Le problème c'est ce sentiment de danger pour soi-même et pour le groupe que peut ressentir le musicothérapeute. Son rôle est de recevoir ces réactions et d'assurer la sécurité du groupe, être là, permettre l'expression d'un désaccord, d'une colère et à la fois connaître les limites à ne pas dépasser et les garantir.


Le silence, lui, peut être magique, comme un coup sur un triangle, moment précieux, temps qui dure peu de secondes mais qui remplit l'espace. Le silence peut aussi sembler pesant dans ce qu'il contient d'interrogations, parce qu'il est suivi de tous les possibles, nous sommes parfois tentés de le rompre alors que justement il est une ouverture vers quelque chose de nouveau, d'imprévisible, un changement possible. Lorsque ce silence ou une non réaction sonore remplit l'atmosphère, le non verbal prend la parole, si on y est attentif, on peut détecter des signes, des expressions de visage, attitudes corporelles, qui sont des expressions par eux-mêmes et n'ont pas besoin de mots, je dirais mêmes qu'ils sont plus criants que les mots. Le verbal est parfois une manière de se rassurer mais peut être un refus de percevoir ces signes, l'expression d'une certaine peur de l'inconnu. Entrer dans le non verbal demande un lâcher prise et une confiance en soi toujours nouveaux. C'est à chaque fois une nouvelle prise de risque, un engagement de notre personne, une demande d'authenticité.


L'efficacité n'est pas toujours la plus grande quand elle est visible, flagrante, gratifiante, elle peut être dans des petites choses, invisibles si on est pas attentif, petites choses qui vont agir en sourdine et être source de changement.
C'est pourquoi l'évaluation d'une séance est difficile car il faut rester prudent, ne pas trop vite interpréter, être comme une sorte d'antenne qui perçoit les sons, l'absence de sons, les mouvements, les rythmes, les attitudes, la hauteur, l'intensité, les regards, expressions de visages. Chacun de ces signes et leur évolution dans le temps peuvent tracer un chemin, être une sorte de piste dont on décripte peu à peu les codes, permettant d'entrer en communication avec la personne et d'avancer avec elle sur son chemin.



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